Pr Belpomme. «Pesticides et cancer sont forcément liés»

Pour le PrBelpomme, l'environnement influe sur les cancers. Le professeur et chercheur, mondialement connu, s'en expliquera lors d'un rendez-vous unique à Morlaix, vendredi.

Dominique Belpomme est professeur de cancérologie au CHU Necker-enfants malades, ainsi que créateur et président de l'Artac.
Dominique Belpomme est professeur de cancérologie au CHU Necker-enfants malades, ainsi que créateur et président de l'Artac.


Cancérologue connu à l'international, vous êtes aussi le créateur de l'Artac (Association pour la recherche thérapeutique anti-cancéreuse), en 1984. Pouvez-vous en rappeler le but?
Il s'agit d'un regroupement international de 1.500 chercheurs et donateurs, qui travaillent tous sur les liens existant entre le cancer et l'environnement. De 1984 à 2004, nous avons d'abord travaillé en partenariat avec l'industrie pharmaceutique pour mettre au point de nouveaux médicaments. Huit au moins ont été appliqués, dont la «morphine retard» très utilisée pour soulager les malades de cancer. A partir de 2000, nous nous sommes dit que malgré ces quinze ans d'efforts, les progrès thérapeutiques n'étaient pas suffisants pour éradiquer le fléau-cancer. Nous avons alors changé notre fusil d'épaule et nous sommes tournés vers la prévention.

Comment en êtes-vous arrivé à la conclusion, très développée dans vos publications scientifiques, d'un lien entre environnement et cancer?
Dans la mesure où il était avéré qu'un cancer sur quatre était lié au tabagisme... il fallait trouver d'où pouvaient provenir les trois quarts restants. Pour nous, le mode de vie intervient, certes, mais n'est pas suffisant pour tout expliquer. Depuis 2004, l'Artac affirme qu'ils sont intimement liés à l'environnement.

Quels facteurs de risques criants citeriez-vous dans notre entourage immédiat?
Il y a les pesticides, d'abord. Deux articles scientifiques, à paraître ce mois-ci, démontreront le lien de cause à effet dont je parle depuis longtemps entre la pollution au chlordécone en Martinique et les cancers du sein et de la prostate (un cancer masculin sur deux!). Et puis bien sûr le domaine des champs électromagnétiques. Nous avons maintenant la quasi-certitude qu'ils peuvent induire des malaises très graves, qui pourraient - même si ça reste encore à démontrer - déclencher une maladie d'Alzheimer chez des sujets jeunes.

Vous tordez le cou à l'idée que l'augmentation du nombre de cancers peut être simplement liée au vieillissement de la population?
Aujourd'hui, bien sûr, on vit plus vieux. Mais on parle là de gens qui sont nés avant la dernière guerre. Donc avant la pollution! Il est clair qu'il faut s'attendre, aujourd'hui, à une diminution de l'espérance de vie dans les pays européens. Tous les nouveau-né qui viennent au monde aujourd'hui portent plus de 200 polluants en eux, dont on sait qu'ils risquent, à l'avenir, de donner des cancers du sein ou de la prostate chez l'adulte. C'est une bombe à retardement...

Comment expliquez-vous que vos recherches et vos résultats sont vivement discutés, notamment par les épidémiologistes (*)?
Le problème avec les épidémiologistes, c'est qu'ils ont des techniques et des méthodes qui ne peuvent mettre en évidence que des facteurs de risque, en soi pas forcément cancérigènes. Ils ne font pas assez appel à la toxicologie et à la biologie pour expliquer les résultats qu'ils obtiennent. Nous confrontons, dans mon équipe, tous ces points de vue: ce qui nous amène à penser que même là où il y a des études épidémiologiques négatives, il peut y avoir un véritable risque de pollution chimique et électromagnétique.

Les pouvoirs publics, non plus, n'ont pas tendance à vous suivre...
Le vrai problème de fond, c'est le déni sociétal, politique et économique que l'on observe en France, sur l'existence d'un lien entre les modifications que nous commettons auprès de notre environnement et l'apparition de la maladie. L'Académie de médecine se trouve à contre-courant complet de la recherche internationale, à ce niveau. Parce qu'elle est, je le dis, sous influence. Celle des lobbies économiques, notamment...

*Les épidémiologistes se basent, pour leurs études, sur les cas de cancers avérés, dans un environnement donné. Plus d'infos www.arpac.info

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