Jacques Ricot. Le regard du philosophe sur l'euthanasie

Demain, à Arradon, JacquesRicot, docteur en philosophie, évoquera l'euthanasie devant les professionnels de la santé. Pour lui, c'est une conception de la fraternité qui est en jeu.

Jacques Ricot est le coauteur de «La tentation de l'euthanasie». Photo DR
Jacques Ricot est le coauteur de «La tentation de l'euthanasie». Photo DR


Quelle définition donnez-vous de l'euthanasie?
L'étymologie (bonne mort) est trop vague pour fournir une définition utilisable. L'euthanasie, aujourd'hui, est le fait de faire mourir une personne délibérément dans le but de mettre fin à ses souffrances. Il convient de ne pas obscurcir le débat en parlant d'euthanasie «passive» qui est le refus de l'acharnement thérapeutique et l'acceptation de la mort qui vient, et non le fait de donner la mort par une sorte d'abstention hypocrite.

La loi Leonetti offre-t-elle un cadre suffisant?
La loi Leonetti offre un cadre satisfaisant mais toujours perfectible, pour encadrer la fin de vie: elle respecte la volonté de la personne qui ne veut pas être prolongée, interdit l'obstination déraisonnable et exige que la souffrance soit apaisée, même si cela devait abréger les jours du patient. Les pays (Espagne, Suède, Allemagne, Argentine) qui ont légiféré ont choisi de reproduire le dispositif de la loi française et ont récusé le contre-modèle du Benelux, qui a cru devoir légaliser l'euthanasie.

Si l'euthanasie est légalisée, faut-il le faire par voie législative, par référendum?
C'est aux responsables politiques de prendre leurs responsabilités car il revient au législateur de se prononcer mais aussi d'éclairer l'opinion au lieu d'en suivre les expressions émotionnelles. Le référendum sur une question aussi sensible, comme sur celle de la peine de mort, aboutirait, sans doute, à exacerber les passions et à favoriser les jugements à l'emporte-pièce, au lieu de laisser toute sa place à l'information objective et aux arguments rationnels.

Le principal obstacle à la légalisation de l'euthanasie est-il philosophique ou religieux?
Certainement pas d'abord religieux, mais philosophique. C'est une conception de la fraternité qui est en jeu. Que signifierait, pour une société, le fait de déclarer publiquement que chacun a droit à être tué légalement dès que sa demande de mourir serait jugée recevable? Il est tellement plus facile ? et économique ? de supprimer le souffrant plutôt que combattre sa souffrance! Aujourd'hui, seul exemple au monde, le Benelux avec ses 28millions d'habitants, autorise le médecin à mettre fin aux jours de ses patients, trahissant le serment d'Hippocrate, ce qui a ouvert une demande d'élargissement indéfini des «indications» d'euthanasie, devenue un «soin» comme un autre. Quelques rares pays, comme la Suisse, autorisent l'assistance au suicide, mais maintiennent l'interdit fait au médecin de donner la mort.

Quel est le but de votre démarche vis-à-vis des professionnels de santé?
Ce sera d'écouter les difficultés que rencontrent les personnes qui accompagnent ceux qui voient leur mort approcher. Les médecins ne sont pas les seuls concernés. Mon propos consistera à expliquer la loi actuelle, très méconnue du grand public et des professionnels de santé, à en montrer les ressources d'humanité. Je dirai aussi que les «affaires» médiatiques sont presque toujours déformées, car la chronique des morts annoncées est toujours plus journalistique et spectaculaire que les morts quotidiennement et anonymement accompagnées. Et puis, je réfléchirai en philosophe à ce que signifie la liberté, l'égalité et la fraternité face à la mort. Pratique Conférence organisée par le groupe Ethique Santé en lien avec la Pastorale Santé, demain, de 14h30 à 20h30 au centre spirituel de Penboc'h, à Arradon (tél. 02.9768.15.48)

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