Darwin. Les professeurs confrontés au doute des élèves

Alors que le monde célèbre les 150 ans de la théorie de l'évolution chère à Charles Darwin, l'idée que le monde est d'essence divine, véhiculée par des lycéens créationnistes, nourrit une contestation de plus en plus vive chez les élèves. Témoignage de professeurs de SVT (sciences et vie de la terre).  

Né il y a 200 ans, Charles Darwin est à l'origine...de l'Origine des espèces. DR
Né il y a 200 ans, Charles Darwin est à l'origine...de l'Origine des espèces. DR

"Nous avons depuis 5-6 ans des retours du terrain qui indiquent une montée du créationnisme en France alors qu'auparavant, c'était exceptionnel", dit Annie Mamecier, doyenne du groupe des Sciences de la vie et de la terre à l'Inspection générale de l'Education nationale. 

Le créationnisme rejette l'idée de l'évolution et postule que Dieu a crée l'univers en une semaine. Né chez les chrétiens au XIXe siècle, il a été relayé par les Témoins de Jéhovah et par des créationnistes islamistes depuis les années 1980. 

Hostiles à Darwin
Mme Mamecier évalue "entre 5 et 10%" le nombre d'élèves qui expriment durant les cours ou sur leurs copies leur hostilité aux théories de Darwin et précise que "les élèves qui manifestent le plus sont d'origine musulmane". 

"Il y a deux types de réactions: des réactions plutôt isolées venant d'élèves qui ont été élevés dans une croyance religieuse et des réactions un peu plus organisées, qui se rapprochent du dessein organisé américain et viennent d'élèves relativement manipulés".
Sophie Mouge, professeure de SVT au lycée Jean-Jaurès à Montreuil, a essuyé deux contestations parmi les 31 élèves de sa classe, lors d'un cours sur l'évolution des végétaux. "Ca s'est traduit par de petits ricanements quand je parlais. Les élèves cherchaient à me tourner en dérision. Un élève m'a dit Non, non, dans le Coran, ça n'est pas écrit cela!", raconte la jeune femme. 

Dans le Coran
Pour Jean-Baptiste de Panafieu, qui a passé plusieurs mois au lycée Jean-Jaurès dans le cadre d'un documentaire, ces élèves contestataires "puisent leurs informations sur internet, sur des sites créationnistes, antidarwiniens, comme le site du turc Harun Yahya". 

En janvier 2007, ce prédicateur avait envoyé massivement aux établissements scolaires l'Atlas de la Création, un livre développant au nom du Coran les thèses créationnistes. Le ministère de l'Education nationale avait riposté en organisant en novembre 2008 un colloque pour "donner aux enseignants des moyens de répondre aux attaques", rappelle Annie Mamecier. 

Critique plus affirmée
Mais pour Carole Diamant, professeure de philosophie au lycée Auguste Blanqui à Saint-Ouen et auteure de "Ecole terrain miné" (*) les "critiques" des élèves sont plus profondes et ont évolué depuis le début des années 2000. "Quand j'ai écrit mon livre, en 2004, la critique était superficielle, spontanée et répétée. C'est quelque chose qui faisait référence à des prêches ou à une opinion religieuse entendue ici ou là", explique Carole Diamant. 

"Aujourd'hui, les enfants sont sûrs de leurs croyances. Ils restent sur leurs positions. Ils disent: Allez-y, racontez-nous Darwin mais nous, on n'y croit pas!". 

D'après Pierre Clément, professeur à l'université Lyon 1 et co-auteur d'une étude sur le créationnisme effectuée dans dix-neuf pays, la France compterait "2% de professeurs créationnistes", à comparer avec les "50% de profs créationnistes au Liban ou au Burkina Faso". Toutefois, "la France est le pays où il y a le moins de créationnistes radicaux", insiste Pierre Clément en ajoutant: "Il y a certes une pression du créationnisme mais la France résiste très bien.

*(éditions Liana Levi, 2005),

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