Merah. Les notes qui accusent la DCRI

Des notes déclassifiées de la DCRI sur l'affaire Merah démontrent «les incroyables ratés» du service de renseignement intérieur dans cette affaire. Elles confirment aussi les troublantes informations révélées par Le Télégramme en juin dernier.

Mohamed Merah aurait été ciblé par la DCRI bien avant la tuerie de Toulouse. Photo AFP
Mohamed Merah aurait été ciblé par la DCRI bien avant la tuerie de Toulouse. Photo AFP
«La DCRI procède par priorités. Mohamed Merah n'en était pas une.» Le 14juin dernier, dans nos colonnes, ces propos d'un policier font écho aux déclarations du grand patron de la DCRI, Bernard Squarcini. Celui-ci s'est longuement exprimé dans un entretien au Monde, trois mois plus tôt: «Mohamed Merah semble s'être radicalisé seul (...). Il n'a pas les attributs extérieurs du fondamentaliste.» Devant le juge d'instruction chargé de l'enquête sur les assassinats, le même Bernard Squarcini est, en septembre dernier, encore plus affirmatif: «Il n'a jamais attiré l'attention des services par son comportement radical.»

Non prioritaire ou cible privilégiée?

Les notes déclassifiées de son service, révélées hier par Le Monde, démontrent tout le contraire. Celle du 7janvier 2011 y décrit un Mohamed Merah «membre actif de la mouvance islamiste radicale toulousaine». En avril, une autre évoque la longue liste de ses contacts «en lien avec la mouvance islamiste en Grande-Bretagne». En septembre enfin, Mohamed Merah est devenu «une cible privilégiée du service». Pourtant, en juin dernier, on assurait au Télégramme que la DCRI avait, à l'époque, «d'autres priorités». Comme ces 46 autres islamistes de la région Midi-Pyrénées ayant effectué des séjours en zones sensibles, qui «présentaient un profil beaucoup plus sérieux et inquiétant» que celui de Mohamed Merah. Pourquoi son nom est-il alors le premier de la liste des principaux suspects islamistes de la DCRI, dès le début de l'enquête judiciaire (*), comme nous l'affirment une source proche de la DCRI et un policier ayant participé à la supervision de toute l'enquête?

La plainte de 2010

Le dernier paradoxe concerne la plainte (violences, séquestration, vidéos djihadistes de décapitation, chants «glorifiant l'extermination des mécréants occidentaux») déposée, deux ans avant la tragédie toulousaine, contre Mohamed Merah, et révélée par Le Télégramme en mars dernier. Ces faits très inquiétants ont-ils été signalés à la DCRI? Oui, apprend-on aujourd'hui. Les faits sont très explicitement évoqués dans une note du 26avril 2011. C'est pourtant une simple et classique enquête de police qui est à l'époque diligentée. Mohamed Merah est convoqué une première fois en août2010, comme le confirme Me Mouton, l'avocat de la plaignante. Mohamed Merah ne s'y rend pas, prétextant un deuil familial en Algérie. Mohamed Merah est effectivement à l'étranger. Mais pas en Algérie. En réalité, entre juillet et décembre, il cherche à rejoindre des combattants djihadistes au Proche-Orient, puis en Afghanistan, où il est signalé, en novembre, à un service de renseignement des armées (la DPSD), qui transmet l'information à la DCRI. Les policiers toulousains ne sont pas mis dans la confidence. En janvier2011, Mohamed Merah se présente à eux sans être inquiété. Il reconnaît alors des violences réciproques, mais nie tous les autres faits. L'enquête sera classée sans suite... Le 23mars 2012, le lendemain de la mort de Mohamed Merah, «pour décès de l'auteur», précise Me Mouton. Pourquoi la DCRI a-t-elle menti sur l'intérêt qu'elle portait à Mohamed Merah et sur son inquiétant profil? Comment a-t-elle pu croire à ses mensonges (il faisait du tourisme) à son retour d'un autre périple en zone sensible (régions tribales pakistanaises), en novembre2011? Et pourquoi a-t-elle levé toute surveillance après cet ultime entretien? (*) Dès le vendredi 16mars, plus de 48heures avant la tuerie de l'école juive, sur une liste de 15 suspects islamistes (ramenée à six suspects le soir du lundi19).

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