Lorsque la loi instaurant le Pacte civil de solidarité (Pacs) a été votée, Erwann Binet était l'assistant parlementaire du député-maire PS de Vienne, Louis Mermaz. Aujourd'hui primo-député de l'Isère, ce Breton, né à Brest il y a 40 ans, est le rapporteur du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. «C'est une volonté forte du Parti socialiste de confier ces dossiers à la nouvelle génération», explique le jeune parlementaire.
Surpris par «ce vocabulaire guerrier»
«On ne s'attendait pas du tout à cette violence, confie-t-il. Treizeans ont passé depuis l'adoption du Pacs... On pensait que les couples homosexuels étaient totalement installés dans la société». Erwann Binet s'avoue surpris «par ce vocabulaire guerrier», «l'incroyable disproportion entre l'outrance des propos et des arguments, et ce dont il est question: de famille, d'enfants, de couple, d'amour...». Mais pas découragé: «Au Portugal, 75% de la population étaient défavorables au mariage homosexuel lorsque la loi a été votée. Aujourd'hui, elle y est favorable à 92%».
Auditions, tables rondes, déplacements... Depuis deux mois, Erwann Binet écoute, propose, défend, amende le texte de Christiane Taubira. «La loi ne crée pas de nouvelle situation. La question, c'est de savoir si on attribue aux homosexuels les mêmes droits qu'aux autres». Oui, incontestablement, pour Erwann Binet. Qui soutient l'amendement proposé par le groupe socialiste sur la procréation médicalement assistée (PMA). C'est «une évidence» pour le député PS, quand une trentaine d'autres parlementaires ont signé un texte s'y opposant.
«Permettre l'adoption intrafamiliale»
«Mariage, adoption et PMA sont les trois piliers de cette loi», martèle l'élu. L'adoption est déjà autorisée en France pour les couples mariés et les célibataires. Ouvrir le mariage aux homosexuels, «c'est permettre l'adoption intrafamiliale, ce qui sera la majeure partie des cas, et l'adoption conjointe par un couple homosexuel». Quant à la PMA, «elle sera réservée aux femmes mariées, homosexuelles ou non». Par contre, il n'est pas question pour Erwann Binet d'associer la gestation pour autrui (GPA) au projet de loi de mariage pour tous. «Ce n'est pas un problème homosexuel. Le ventre d'une femme ne peut pas faire l'objet d'un contrat. Le débat est tranché depuis longtemps en France, il n'y a pas de raison de revenir dessus».
«Le vote politique dominera»
Après quelques jours de vacances en famille en Finistère-sud, Erwann Binet présentera, à Paris, «les amendements du rapporteur» aux alentours du 10janvier. La commission des lois entamera ensuite ses travaux, avant l'examen du texte par les députés, à partir du 29janvier. «Le principal clivage sur ce sujet est générationnel, conclut le rapporteur. Pas socioprofessionnel, pas géographique... Mais il y a une appropriation politique du sujet. Alors, oui, le vote politique domineraà l'Assemblée».